Enfant je ne le savais pas, je ne me doutais pas que quelqu’un pouvait nous aimer d’un amour incommensurable. Enfant je ne me posais pas la question de l’amour, car enfant nous sommes amour. Les années passent et nous déconnectent de l’amour infinie, finalement c’est le jeu de la vie et de la pression de l’humain. L’amour n’est pas la question, l’amour ne fait pas partie du processus. Alors que l’amour est le commencement et la fin, finalement on le déplore surtout quand il s’éteint.
Je traverse les nuages et je ne vois pas ce qu’il se passe en dessous. C’est souvent la sensation que j’ai eue au cours de ma vie. J’ai cependant eu la chance de trouver la lumière et de me laisser porter grâce à quelques rares personnes. Tu faisais partie d’elle mamie, tu en as même souvent été l’héroïne principale. Quand j’ai peur, je me souviens que tu étais toujours en avance devant le portail de l’école avec une douceur pour me féliciter de ma journée. Je sais que tu me protèges même du ciel.
Tu m’as appris l’amour infini mais aussi l’amour conditionnel et celui-là m’a fait peur. Je ne te juge pas car je sais qu’à l’instant T c’est le seul amour que tu connaissais, le seul amour que tu arrivais à transmettre, véritable, intense mais parfois lourd. J’ai eu peur car trop souvent tu as voulu que je te sauve de ta solitude, de ton manque d’amour envers toi-même, trop souvent tu voulais être libéré de tes chaînes et revivre par moi.« Appelle plus souvent, vient dormir chez Mamie, fais comme ça c’est mieux pour la suite de la vie, etc. »La pression était grande moi je ne voulais pas te décevoir, je voulais te porter, je voulais te montrer que j’étais à la hauteur de ton amour et des sacrifices que tu as faits dans ta vie, même que moi je me protègerai des injustices que tu as subies.
Je me suis perdue avec ton amour, mais me perdre m’ai permis de comprendre et m’a permis de te montrer que l’amour ne passe pas par la réalisation mais juste par l’acceptation. J’ai eu peur quand tu es tu t’es éteinte de ne plus être assez aimé. J’ai croulé sous ton amour, j’ai fui par ton amour, j’ai été émerveillé de ton amour et aujourd’hui je transmets ton amour.
J’ai pris du temps à entendre que personne ne nous « doit » l’amour.
C’est ce que j’ai appris grâce à ton cheminement mamie, grâce à ton héritage, je sais que le plus beau des cadeaux que je puisse me faire c’est de m’aimer sans douter que je sois aimé, éternellement. J’ai lu cette phrase d’Oprah qui représente tellement la leçon que j’ai apprise en grandissant « Vous devez avoir suffisamment de courage pour vous donner l’amour que vous n’avez pas reçu. » Tu n’avais pas reçu assez d’amour dans ta vie mamie, j’en suis consciente. Je t’ai aimé autant que j’ai pu, j’ai aimé rester assise dans le canapé chez toi des heures à bouquiner, à te regarder prendre plaisir juste de me voir lire. Je t’ai aimé quand tu faisais tous mes plats préférés et que tu m’apprenais à les cuisiner. Je t’ai aimé quand tu m’as appris à nettoyer tes « naco » et tes carreaux de salle de bain. Mamie je t’ai aimé même quand tu m’empêchais de sortir voir mes copines « dehors » que tu me tapais la honte à m’accompagner à l’arrêt de bus, que tu m’empêchais de sucer mon pouce ou que tu m’obligeais à me brosser les dents.
Mais Mamie tu ne t’es pas assez aimé toi, ce cycle se termine maintenant et je t’interdis de le reproduire dans une autre vie.
Pars dans l’amour, aimes-toi, tu le mérites et personne ne le fera mieux que toi-même.
J’ai hérité d’énormément, plus que des millions, j’ai hérité de l’amour et surtout j’ai hérité de l’obligation de choisir l’amour.
Je vais m’y atteler chaque jour Mamie.
Voilà, voilà,
Amicalement vôtre,
Kath